« Nous constatons une augmentation constante de la cybercriminalité », affirme Bertrand Ruffieux, porte-parole de la police cantonale fribourgeoise. Des propos qui font écho à ceux recueillis auprès des autres polices romandes. « La tendance est à la hausse », confirme ainsi son homologue valaisanne Cynthia Zermatten.

Mais pour obtenir des chiffres officiels, il faudra patienter. Ils seront communiqués en mars lors de la diffusion de la statistique policière 2020 de l’Office fédéral de la statistique.

Dans le cadre de notre enquête, nous avons souhaité mettre l’accent sur les arnaques liées aux sentiments et à la sexualité. Selon la Brigade d’analyse des traces technologiques et le Service de la prévention de la criminalité de la police cantonale vaudoise, trois types d’arnaques sont distingués.

« Romance Scam », escroquerie romantique en français

L’escroc, caché derrière un faux profil, approche la victime sur un site de rencontres ou sur les réseaux sociaux comme Facebook. Il sort le grand jeu et lui dit des mots d’amour. Au bout de quelques semaines, l’arnaqueur trouve un prétexte bidon pour demander de l’argent à la victime. Dans le 19h30, une femme de 80 ans raconte ainsi qu’un homme avec lequel elle était en contact depuis près de deux mois lui a demandé un prêt de 35’000 euros pour débloquer un héritage de 2 millions d’euros qu’il devait toucher au Maroc. Elle a flairé l’arnaque et a alerté la police.

En 2020, quelque 120 victimes ont porté plainte auprès des polices vaudoise, valaisanne, jurassienne et neuchâteloise. Rien que dans le canton de Vaud, 84 plaintes ont été déposées l’an dernier. « Les romances scams constituent plus de 27% du préjudice lié à la cybercriminalité. Cela représente des millions de francs pour 2020 », précise Florence Frei, chargée de communication de la police cantonale vaudoise. « Le préjudice pécuniaire pour les victimes est souvent très élevé », ajoute-t-elle.

Selon les polices cantonales, le nombre de plaintes déposées ne reflète pas l’ampleur du phénomène. « Par pudeur, par crainte ou par honte, les victimes ne dénoncent pas systématiquement les faits. Les chiffres doivent donc être appréciés avec une certaine réserve », estime Bertrand Ruffieux, porte-parole de la police fribourgeoise.

« Sextorsion »

L’escroc crée un profil bidon – souvent de jeune femme – sur les réseaux sociaux (Facebook ou Instagram, par exemple) et approche sa victime. Il fait en sorte que la discussion tourne autour du sexe et que son interlocuteur finisse par se déshabiller et se masturber par caméras interposées.

L’arnaqueur enregistre la vidéo puis menace de la diffuser si la victime, souvent un homme, ne paie pas. Selon les polices vaudoise, valaisanne, jurassienne et neuchâteloise, plus d’une centaine de plaintes ont été déposées en 2020.

Dans le 19h30, Stéphane Koch, expert en questions numériques suggère de ne jamais céder au chantage. « Il est conseillé de ne pas payer parce qu’on n’a aucune garantie que la vidéo ne soit pas diffusée ultérieurement », explique-t-il. Cet expert incite également à porter plainte. « Il n’y a pas de honte à avoir. La honte est dans le camp de celui qui produit le chantage et non de la victime », affirme-t-il.

Les fausses annonces de prostitution

Un faux profil de femme en petite tenue aborde principalement des hommes sur Facebook, Instagram, Twitter ou sur des sites de petites annonces, par exemple. L’escroc donne parfois un numéro de téléphone et propose une relation sexuelle tarifée.

« Si la victime accepte, l’arnaqueur demande un paiement en avance sous forme de cartes cadeaux (iTunes, Google Play) ou sous forme de recharge pour cartes prépayées (paysafecard, PCS) », explique Florence Frei, chargée de communication de la police vaudoise. La victime se rend alors à l’adresse fournie par la fausse prostituée, mais ne trouve personne.

Interrogé par le 19h30, Patrick Ghion, chef de la section forensique de la police cantonale genevoise, explique que contrairement à ce qu’on peut penser, ces arnaques liées aux sentiments ou à la sexualité ne sont pas nécessairement le fait d’individus isolés. « Ces actes sont plutôt le fait de réseaux, de bandes organisées qui opèrent notamment en Afrique de l’Ouest ou en Europe de l’Est », précise-t-il.

Les polices ne le cachent pas, il est rare que les auteurs soient arrêtés. « La prévention à l’attention de toute la population reste la meilleure arme pour contrer ces différentes escroqueries », affirme ainsi Bertrand Ruffieux, porte-parole de la police fribourgeoise.

SOURCE RTS